Reprise de volée

Publié le par La Zitoune

La Terre vue par Lothaire

Tous les 4 ans, c'est la Coupe du monde de football. Les meilleures équipes nationales entrent en compétition... et le supplice recommence. Un soap opera interminable, un feuilleton monotone pour qui s'en contrecarre du ballon rond. Des dizaines de matchs, des heures et des heures de retransmission, des milliards de fanatiques sur la planète et quelques millions pour les Bleus français. Et, parmi ces aficionados : une poignée de hooligans (des barbares tel Attila le Hun), des racistes, des attardés quoi.

Deux groupes de 11 joueurs en maillot, short, grandes chaussettes, protège-tibia et chaussures à crampons s'opposent dans un stade, sur un terrain rectangulaire, devant des milliers de personnes hystériques entassées sur des gradins pas toujours sécurisés. Le but du jeu : envoyer un projectile sphérique dans la cage du camp adverse, sans se servir de ses bras. Un sport de manchots, sauf pour le gardien qui lui a le droit d'utiliser ses mains dans sa surface de réparation. C'est la seule personne que je plains sur le gazon : imaginez son angoisse au moment d'un penalty... 

90 minutes + une mi-temps d'un quart d'heure + des éventuelles prolongations + de probables tirs au but : c'est lonnnnnnnnnng ! La FIFA, qui n'a rien d'autre à foutre, surveille l'application uniforme de 17 lois partout dans le monde.

Un arbitre court partout et distribue parfois un carton jaune (petite fessée) ou un carton rouge (grosse expulsion). On l'appelle le 12ème homme et il paraît - à entendre les mâles assis en brochette sur les canapés - qu'il est aveugle, corrompu, vendu, un cochon, qu'il ne court pas assez vite et relève de la pire pourriture que la Terre ait portée jusque-là.

Un joueur court entre 6 et 11 km par match et perd 2 kg en moyenne. M'enfin, vu ce qu'ils sont payés, on ne va pas s'apitoyer ! Ca, c'est fait.

En général, les garçons découvrent ce sport populaire dans la cour de récréation ; cartables et blousons faisant office de poteaux. Gare à l'instit' distraite qui traverse le terrain ou les cages ! C'est aussi l'époque des échanges de vignettes Panini, des étalages de connaissances sur des joueurs emblématiques et des maillots floqués au nom des enfants, qui coûtent la peau du Q aux parents.

Ainsi, après cette entrée en matière à l'école, beaucoup de jeunes intègrent un club de foot local et deviennent des licenciés (un avant-goût de la vie professionnelle qui les attend). Ils sont des millions de joueurs à travers le monde à obliger leurs parents (en général le père) à les trimbaler tous les week-ends de village en village pour disputer des matchs et à laver régulièrement des tenues crottées (en général la mère).

Plus tard, ils deviendront logiquement des supporteurs de telle ou telle équipe, souvent pour des raisons obscures, et, parfois, intégreront des fans-clubs. Mais ce qui est plus difficilement compréhensible, c'est que les hommes qui ont choisi de pratiquer le basket-ball, le volley-ball, le hockey, la danse classique, la poterie ou la peinture sur soie sont aussi des inconditionnels ! Pas tous, heureusement...

Comment expliquer cet engouement ? 

Freud a une explication. Les hommes, dotés - comme chacun sait - d'un pénis, auraient besoin de se sentir appartenir à une même communauté. Le foot, universellement masculin, leur permettrait alors de se rassurer sur le fait qu'"ils en ont un". Que penser alors de la montée en puissance du foot féminin ? et de toutes ces femmes qui, depuis quelques années, ont rejoint leur mec sur le canap' à grand renfort de chips, de pizzas et de bières ? Oui, c'est la mode d'être une femme qui aime le foot. Une sorte de pandémie.

Notons au passage qu'aimer regarder le foot à la télé semble ne pas être bon pour la ligne, le taux de cholestérol, d'alcoolémie ou le coeur. Toutes ces émotions (faire une tête, un plongeon, un dribble, une roulette, une savonnette, un amorti, une piquette, ... (Voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Lexique_du_football) incitent à ingurgiter des aliments peu respectueux des règles diététiques de base.

Rares sont les footeux qui s'empiffrent de bâtonnets de carottes devant un match. Pringles et Heineken se disputent le Ballon d'or.

Autre question cruciale : pourquoi les supporteurs de foot se croient-ils obligés de gueuler comme des veaux ? J'ai pu observer à de nombreuses reprises (de volée ah ah ah !) que les hommes vocifèrent quand ils regardent un match, ils éructent, se touchent beaucoup les glandes reproductrices et/ou l'organe de la reproduction, se jettent dans les bras les uns des autres, s'embrassent à pleine bouche, ou bien se lèvent d'un seul coup en se tenant la tête à deux mains, voire en s'arrachant les cheveux (ou ce qu'il en reste). Il arrive également, en fonction du score, qu'ils pleurent, s'engueulent et s'insultent. J'ai même entendu un ami hurler que Machin devait se bouger le fion parce qu'on n'était pas à la danse. Cet homme, d'ordinaire poli et tout en délicatesse, postillonnait tant et plus. Avouez que c'est curieux.

En fin de match, on remarque que les supporteurs ont souvent l'air plus fatigué que les joueurs, s'ils ont perdu bien sûr (oui, c'est eux qui jouaient !), parce qu'en cas de victoire ils sont en pleine forme et klaxonnent pendant des heures, vitres baissées, en s'époumonant.

Qu'il gagne ou qu'il perde, le supporteur parle, parle, parle. Même si tu lui dis et redis que tu t'en cognes du foot, au moins autant que de ton premier tutu, il ne peut s'empêcher de t'expliquer la dernière tactique, le dernier rachat de Machin (oui, les joueurs s'achètent ; horrible concept !), l'enjeu de la prochaine rencontre, la dernière saillie de tel joueur. Le supporteur ne sait pas la fermer, le supporteur soûle. Le seul moyen d'avoir la paix est de lui dire ce qu'il veut entendre : que son club favori est le meilleur, que les Bleus vont gagner au Brésil, que - oui Léo - y'a pas mieux que l'Olympique lyonnais :-).

Même ma pacifique boulangère s'y met et, devant mes yeux estomaqués (note la souplesse), agresse un client qui ose porter le maillot du Brésil : M'enfin ! on est en France tout de même !lui envoie-t-elle dans les dents en lui tendant sa baguette bien cuite.

La tradition de fin de match qui consiste à s'échanger les maillots dégoulinants de sueur entre équipes me laisse pantoise. Je sais bien que des systèmes sophistiqués d'évacuation de la transpiration évitent les odeurs pestilentielles, mais quand même... Je ne me verrais pas filer mon tee-shirt à quelqu'un au sortir de la salle de sport, et encore moins accepter celui d'un rougeaud transpiratator.

Un peu de mauvais esprit : comment se fait-il que les citoyens ne s'emballent pas autant pour des élections, bien plus essentielles pour leur avenir et celui de leurs enfants, que pour un jeu de baballe connu depuis l'Antiquité ? En tout cas, ça arrange bien Flamby et le gouvernement tout ça : occupés à brailler devant leur écran, les Français en oublient presque la crise.

Pourquoi ne suis-je pas arrivée à m'intéresser à un match depuis le début de la Coupe du monde 2014 ? Pourquoi mon esprit divague-t-il automatiquement dès que le sifflet se fait entendre ? Peut-être parce que mon père a eu la mauvaise idée de s'éteindre brutalement en mai 1998, deux mois avant vous savez quoi... qu'il attendait avec tellement d'impatience. Mon enfance, "bercée" par des Allez les Verts !, chantés de préférence debout sur le canapé, les bras en l'air et le sourire aux lèvres, est voilée par We are the Champions, qu'il n'a pas vécu. La mort est fourbe.

 Vivement le Tour de France !

Publié dans Thèmes d'actualité

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L
J'avoue ma faiblesse... Le foot est le sport qui me transmet le plus de sensations ! La preuve en est que l'équipe que je supporte n'est pas résumée à "elle" mais à "on" ! En tout cas l'abitre (oups l'article !) est très bon :D
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L
Trop aimable mon lardon :-)
L
Oh mais c'est le Chameau ! Comment vas-tu yau de poêle ? Elles étaient bonnes les chips ? :-)))
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C
tout à fait d'accord avec ton texte .Trop d argent en jeu , pour un sport ou les joueurs sont trop payer , et ont aucun respect pour le pays pour le quel ils jouent .
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L
Euh... ben merci pour la visite. Tous les footeux ne sont pas susceptibles, c'est une bonne nouvelle :-)
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P
article interressant, bien écrit. Je suis d'accord sur tout, pourtant il m'est toujours impossible de m'expliquer le grand cri que j'ai poussé sur le but de Zidane, je m'en rappelle encore.
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