Vendredi 22 juillet 2022, Kristina et Jean se sont dit "oui"

Publié le par La Zitoune

Se marier peut être stressant, enfin... je l'imagine. Se rendre à un mariage peut également l'être, au moment du choix d'une tenue. On a toujours l'impression que ce qui se trouve déjà dans nos armoires ne fera pas l'affaire. Comme si tout le monde allait voir que cette robe a déjà été portée moult fois, y compris pour d'autres mariages. Alors on arpente les galeries commerciales, en cherchant - dans la mesure du possible - "un petit quelque chose que l'on pourra remettre après",  "avec des petites tennis blanches et une petite veste en jean". À croire que les vendeuses ont toutes appris cette petite phrase par cœur.
Pratiquer cette activité avec Fabien est un moment très agréable. Il joue aux échecs en attendant que je sorte de la cabine et me donne une note comprise entre 0 et 10. J'ai l'impression de participer à "L'école des fans". Heureusement, Jacques Martin ne me postillonne pas dessus. Parfois, je vois un bras entrer par effraction dans la cabine et, au bout, un cintre sur lequel pendouille un vêtement.
Le mariage auquel nous nous rendons se déroule en Gironde, non loin de Saint-Émilion. L'église Saint-Vincent est à Floirac, petit village cerné par les vignes à perte de vue et par une multitude d'autres sites en "ac". Et des demeures bourgeoises partout, qui se présentent elles-mêmes comme des châteaux. Ça hume la bonne picole et, accessoirement, le fric qu'on se transmet par héritage familial.
Le temps est idéal, il fait beau mais on ne dégouline pas. Toute l'assemblée utilise l'éventail blanc laissé délicatement pour elle sur chaque siège prêt à recevoir un séant bien vêtu dans l'antre de Dieu.
On dirait un essaim de papillons silencieux. Jésus, sur sa croix, juste au-dessus de nous, pourrait attraper froid avec tous ces courants d'air. Heureusement, il a sa feuille de vigne.
Nous sommes quatre sur le même banc. Mon chéri (oncle du marié) rasé de près, dans sa chemise neuve bien repassée et ses chaussures cirées de la veille, Sarah, sa fille pétillante en robe à fleurs et échasses, Samuel, son fils, charmant et cravaté, et moi-même (avec un serre-tête ridicule qui me gratte derrière les oreilles).
Les futurs mariés, descendus de Paris pour cette grande occasion, sont beaux, et leur entrée dans l'église est... remarquée. Encore heureux, me direz-vous. 😃 Jean est élégant dans son costume et Kristina porte une robe blanche, sans meringue et raffinée. Ils sont à la fois sobres et classes, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Le nombre de fois où je me suis dit, dans ce même genre de situation, que les tourtereaux en train de s'épousailler avaient l'air engoncé et qu'il suffirait qu'ils éternuent pour faire péter toutes les coutures... Là, ce n'est pas le cas. Ils respirent librement et calmement.
Le prêtre est drôle et se présente comme le ministre de la Religion, avec un petit rire malicieux. Il lâche quelques mots en russe pour faire plaisir aux origines de Kristina, qui sourit à pleines dents. Les vœux seront échangés en anglais, leur langue commune.
Deux "Yes" retentissent dans la petite église de Floirac, sous le regard attendri des invités à la cérémonie.
Les parents des mariés se sont mis sur leur 31 et envoient des rais de fierté parentale dans un halo d'un mètre cinquante. Les deux familles sont côte à côte et pourtant à des milliers de kilomètres l'une de l'autre. Jean Christophe et Pascale, les parents de Jean, sur un banc devant l'autel, Andrei et Raïssa, ceux de Kristina, en visio sur un trépied, non loin de Moscou. De la difficulté d'obtenir des visas en ces temps houleux... Comme si l'Amour avait quelque chose à voir avec cette guerre ! Heureusement pour la mariée, quelques amis russes sont parvenus à faire le déplacement. Les voies de l'administration sont, elles aussi, impénétrables.
Des baisers, des applaudissements, des cris de joie, des félicitations et des pétales de fleurs plus tard, nous voilà tous partis au château de Fombrauge, à Saint-Christophe-des-Bardes.
Oui, le traditionnel lancer de riz a fait place au lancer de pétales. Fabien, distrait, a laissé  passer le coche collectif et lorsqu'il s'est enfin décidé à vider son cornet fleuri en direction des mariés, une rafale de vent autant insolite que brève lui a tout ramené en pleine poire. Une capucine accrochée dans ses cheveux crépus nous a accompagnés jusqu'au château. Le romantisme reconnaît les siens.
L'endroit est magnifique. Les vignes sont toujours omniprésentes, le raisin vert ne demandant qu'à mûrir. Le parc est très agréable. Un petit vent rafraîchissant pourrait annoncer la pluie, mais non, Éros est clément et pousse les nuages plus loin.
Anastasia, la dynamique photographe russe mitraille tout le monde, par grappes et en traditionnel troupeau sur les marches de l'escalier de la demeure. Ses consignes sont claires, les gens disciplinés, l'exercice ne prend que quelques minutes. D'habitude, cela dure plutôt une heure.
Aujourd’hui, tout est simple et s'enchaîne avec une fluidité remarquable.
Puis, le champagne coule à flot dans le parc et un ballet de serveurs se met en place. Ils passent entre les invités avec des plateaux de petits fours divers et variés, tous plus succulents les uns que les autres. Des saveurs nous explosent en bouche ! Le saumon à la citronnelle, le foie gras, les huîtres en pagaille et tellement d'autres délices. Avec Fabien, on s'arrange pour être sur le chemin des serveurs. On calcule leur trajectoire et, l'air de rien, hop ! on se décale à droite ou à gauche, en sifflotant si nécessaire. Un serveur à lunettes rondes dorées nous a repérés et, au bout d'un moment, nous fonce dessus en rigolant à chaque sortie de cuisine. Si tu ne vas pas à la bouffe, elle vient à toi.
L'ambiance est très agréable. Nous découvrons des gens : Édouard, un dessinateur russe survolté qui crée des films d'animation à Paris, Raphaël, un jeune adorable qui transite au Gabon pour affaires et mord la vie à pleines dents avec une chouette mentalité, sa maman, Marie-Claire, écolo incarnée et non moins enjouée, Laurence*, un amour de femme que l'on aime à l'instant où elle ouvre la bouche (je ne peux pas mieux le dire), et bien d'autres convives... [*Fabien me dira : "Je ne lui ai jamais dit, mais j'ai toujours considéré Laurence comme une grande soeur".]
Je rencontre également la famille maternelle de Fabien : Luce-Anne, sa nièce (et sœur du marié), son mari Khaled et leur bébé Jonas, trio qui irradie de bonheur contagieux, de vraie gentillesse et d'un humour vif qui me cueille à chaque repartie, Valérian, son neveu (et fils de Laurence), qui crépite de modestie et d'intelligence et paraît avoir déjà vécu 100 ans tant il semble philosophe.
Au milieu de tout ce monde, quelle ne fut pas notre surprise d'apercevoir le ministre de la Religion, un sourire jusqu'aux oreilles. Le représentant de Dieu ne crache pas sur les petits fours. 😊
Alors que, personnellement, je commençais à être pompette après plusieurs coupes de champagne en plein cagnard (toujours accuser le Soleil), Sarah et Sam sont venus nous chercher pour faire des photos. En effet, un photomaton était installé en plein air et à disposition. Quelle idée géniale ! Et quel fabuleux cadeau pour les invités ! Photos sérieuses et grimaçantes se sont succédé, dans un moment partagé délicieux et ponctué de rires sonores.
Quelle joie de voir Fabien au milieu des siens !
Enfants, neveux, nièce, frangin, ...
La soirée continue autour d'un repas plus que savoureux, à l'intérieur du château. Mais auparavant, des déclarations enflammées s'enchaînent au micro : une maman tellement chamboulée par le mariage de son fils unique qu'elle en bafouille et accuse le champagne et ses lunettes de vue, l'émotion roulée en boule dans la gorge, un papa tout en contrôle pour ne pas se laisser déborder, qui dit, l'air de rien, sa fierté à son fils et aussi qu'il l'épate, comme toujours précise-t-il, et à sa bru qu'elle fait partie de la famille, une cousine germaine qui retrace avec humour une enfance souvent partagée avec Jean, avec la voix tremblotante et un amour qui perle dans les yeux, un copain d'enfance qui lâche un "je t'aime" après une déclaration d'amitié bouleversante, des amis d'études qui regorgent d'anecdotes croustillantes et parlent de futur à conquérir, l'un d'entre eux venu spécialement de l'île Maurice pour assister au mariage de son pote.
Tout ce petit monde nous a bien tiré les larmes. Disons-le. Que ces moments suspendus font du bien à l'âme ! Et quelle générosité de part et d'autre...
Après un repas digne de tout le reste, les jeunes mariés ont ouvert le bal et la piste de danse s'est mise à clignoter. J'ai alors pu expérimenter le zouk sur Bowie, les Stones, ..., et même Claude François. Il faut savoir que pour mon Martiniquais, le zouk est la danse suprême ; celle qui ridiculise le rock endiablé et se moque du slow langoureux. Il y a des prises universelles, et pour lui, la danse universelle.
Peu importe la musique, le lieu ou le rythme, on danse le zouk. 
C'est fourbus et, en ce qui me concerne, ivre juste ce qu'il faut (comprendre : encore digne...), que quelques heures plus tard nous avons abandonné Sarah et Sam à la fête pour rejoindre l'hôtel Ibis à Saint-Émilion. Mais avant cela, les bulles de champagne avaient dû coaguler dans ma tête... Comme nous disions au revoir aux mariés et que Jean nous demandait si nous avions passé une bonne soirée, je me suis surprise à répondre sans filtre et tout à trac : "Ah oui alors ! C'était génial ! Pas une fausse note ! D'habitude, j'me fais chier comme un rat mort dans les mariages, mais alors là ! pas une minute !!! Merciiii beaucoup !"
Ce qui fait que le lendemain, lors du brunch, alors que le champagne avait quitté mon corps, Jean m'a dit avec un grand sourire : "Alors ? Ça va toujours ? Tu te fais toujours pas chier ?" 😬 Je suis très classe comme nana, n'est-il pas ? On ne retient de moi que mon langage soutenu et ma réserve naturelle. 😄
Mais n'empêche que je pensais chaque mot. Sarah a très bien résumé toute l'organisation des festivités : "Maintenant, je sais que je ne me marierai jamais, parce que je ne pourrai jamais faire mieux. La barre est trop haute !"
Quant à Samuel, il a exprimé quelque chose que tous les invités ont dû ressentir : "C'est fou ! Ici, même une simple carotte se transforme en un aliment délicieux ! Au début, je me suis dit mais qu'est-ce que c'est que cette carotte ?! Puis j'ai goûté et là... wouahouuu !!!"
C'est tout à fait ça, wouahouuu du début à la fin, depuis l'église jusqu'au brunch inclus, tout était beau, émouvant, bon, joyeux et mémorable.
Longue vie aux mariés ! Et merci pour ce très bon moment ! 
Да здравствуют жених и невеста! И спасибо за это прекрасное время!

Vendredi 22 juillet 2022, Kristina et Jean se sont dit "oui"
Vendredi 22 juillet 2022, Kristina et Jean se sont dit "oui"

Publié dans Lys, Mes réalités

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